Si nous reprenons depuis le début, nous pouvons maintenant affirmer que :
Admettons ! me direz-vous. Mais ne pourrait-on pas convenir que, instituée ou pas par Jésus, la papauté étant devenue par la suite une réalité incontournable, on peut tout de même considérer qu'elle a hérité de la succession apostolique et qu'elle a apporté, à sa manière, sa contribution à l'édification de l'Église Universelle ?
Pour répondre à cette question, nous regarderons à présent :
Le principe de la papauté est aussi étroitement lié, dans l'Église Catholique, à la revendication de la succession apostolique.
« L'Église est apostolique : elle est bâtie sur des assises durables : les 12 apôtres de l'Agneau (Apoc.21.14) ; elle est indestructible ; elle est infailliblement tenue dans la vérité : le Christ la gouverne par Pierre et les autres apôtres, présents en leurs successeurs, le Pape et le collège des évêques ».
« L'unique Église du Christ, dont nous professons dans
le Symbole qu'elle est une, sainte, catholique et apostolique (...), c'est dans
l'Église Catholique qu'elle existe, gouvernée par le successeur de Pierre et
par les évêques qui sont en communion avec lui, encore que des éléments nombreux de
sanctification et de vérité subsistent hors de ses structures ».
(Catéchisme de l'Église Catholique, art. n° 869 et 870).
Ici encore, il est nécessaire de bien ordonner les idées. L'œuvre des douze apôtres et de Paul, telle que la relatent les écrits du Nouveau Testament, est manifestement conduite par l'Esprit Saint. Mais peut-on en dire toujours autant de l'œuvre de tous leurs successeurs, des premiers temps de l'Église à nos jours ? C'est pourquoi il est nécessaire d'établir une distinction entre tradition apostolique et tradition ecclésiastique.
C'est la transmission de la Révélation de la Nouvelle Alliance par les apôtres choisis et formés par Jésus, ainsi que par l'apôtre Paul que le Seigneur a appelé plus tard en se révélant à lui. Cette tradition a été fixée de manière définitive dans le Canon du Nouveau Testament.
C'est la transmission de la Nouvelle Alliance par les successeurs des apôtres. Cette transmission, par sa nature, ne peut être qu'entièrement soumise à la tradition apostolique contenue dans la Bible. Car Jésus a dit :
« Si vous demeurez dans mes paroles, vous êtes vraiment mes disciples » (Jean 8.31).
Il est donc clair qu'en fondant notre foi sur le Nouveau Testament, nous observons également la véritable tradition apostolique et que toute tradition ecclésiastique ne peut être respectable que si elle n'entre pas en contradiction avec les Saintes Ecritures.
Nous savons très bien, par les écrits du Nouveau Testament, que dès ses débuts, l'Église de Jésus-Christ n'a pas été à l'abri des querelles et des divisions. C'est ce sujet que l'apôtre Paul aborde dans le début de sa première lettre à l'église de Corinthe :
« Car, mes frères, j'ai appris à votre sujet, par les gens de Chloé, qu'il y a des disputes au milieu de vous. Je veux dire que chacun de vous parle ainsi : Moi, je suis de Paul ! et moi, d'Apollos ! et moi, de Céphas (Pierre) ! et moi, de Christ ! Christ est-il divisé ? Paul a-t-il été crucifié pour vous, ou est-ce au nom de Paul que vous avez été baptisés ? » (1 Corinthiens 1.11-13).
Lorsque l'Église Catholique revendique avec insistance sa légitimité, son authenticité, sa primauté sur la chrétienté en se réclamant de l'apôtre Pierre, elle ne fait rien de moins que la jeune église de Corinthe. En commençant à porter leurs regards vers les hommes, au lieu de les fixer sur la personne de leur Sauveur, nombreux furent les chrétiens qui ont commencé à dévier de la ligne droite de l'Évangile. Face à ce danger, les premiers conciles ont combattu avec ardeur les hérésies. Malheureusement, en pactisant avec les pouvoirs politiques, des chrétiens sont parvenus à dominer sur les autres. C'est le passage de la tradition apostolique à la tradition ecclésiastique ou cléricale, de l'humble service de l'Évangile à la fonction de dignitaire ecclésiastique.
Il est évident que lorsque l'Église romaine s'est élevée aux yeux des hommes, cumulant pouvoir temporel et pouvoir spirituel, elle a montré en même temps qu'elle ne suivait plus les recommandations de l'apôtre Pierre :
« Voici les exhortations que j'adresse aux anciens qui sont parmi vous, moi ancien comme eux, témoin des souffrances de Christ, et participant de la gloire qui doit être manifestée : Paissez le troupeau de Dieu qui est sous votre garde, non par contrainte, mais volontairement ; non pour un gain sordide, mais avec dévouement ; non comme dominant sur ceux qui vous sont échus en partage, mais en étant les modèles du troupeau. Et lorsque le souverain Pasteur paraîtra, vous obtiendrez la couronne incorruptible de la gloire. » (1 Pierre 5.1-4).
Nous voudrions maintenant aborder quelques domaines au sujet desquels les papes ont particulièrement imposé leurs points de vue et pouvoirs de décision.
À ces différentes questions qui se sont posées au long de l'histoire de la chrétienté, nous donnerons les réponses que Jésus avait par avance fournies (Évangiles) et celles que l'apôtre Pierre a lui-même laissées dans ses lettres.
L'apôtre Pierre n'aurait pas imposé le célibat comme norme aux serviteurs de Dieu :
« Jésus se rendit ensuite à la maison de Pierre, dont il vit la belle-mère couchée » (Matthieu 8.14).
« N'avons-nous pas le droit de mener avec nous une sœur qui soit notre femme, comme le font les autres apôtres, et les frères du Seigneur, et Céphas (Pierre) ? » (1 Corinthiens 9.5).
S'il avait été pape, l'apôtre Pierre n'aurait jamais revendiqué l'infaillibilité, parfaitement conscient de la faiblesse humaine, à commencer par la sienne :
« Tu m'es en scandale, car tes pensées ne sont pas les pensées de Dieu, mais celles des hommes » (Matthieu 16.23).
« Mais lorsque Céphas (Pierre) vint à Antioche, je (Paul) lui résistai en face, parce qu'il était répréhensible » (Galates 2.11).
Ce qui, par la suite, n'a pas empêché Pierre de rendre témoignage à son frère Paul en ces termes :
« Croyez que la patience de notre Seigneur est votre Salut, comme notre bien aimé frère Paul vous l'a écrit, selon la sagesse qui lui a été donnée » (2 Pierre 3.15).
S'il avait été pape, l'apôtre Pierre n'aurait pas entraîné la chrétienté dans les sanglantes et inutiles croisades, ni dans l'abominable Inquisition.
« remets ton épée en place, car tous ceux qui prendront l'épée périront par l'épée » (Matthieu 26.52).
« mais, puisque celui qui vous a appelés est saint, vous aussi soyez saints dans toute votre conduite » (1 Pierre 1.15).
S'il avait été pape, l'apôtre Pierre n'aurait pas censuré la Bible, Parole de Dieu, en faisant interdire sa lecture, en combattant sa diffusion et en refusant de la reconnaître comme source unique d'autorité dans l'Église1 :
« Celui qui ne m'aime point ne garde point mes paroles. Et la parole que vous entendez n'est pas de moi, mais du Père qui m'a envoyé » (Jean 14.24).
« Vous avez été régénérés, non par une semence corruptible, mais par une semence incorruptible, par la Parole vivante et permanente de Dieu » (1 Pierre 1.23).
S'il avait été pape, l'apôtre Pierre aurait refusé catégoriquement d'exercer un pouvoir temporel en plus de ses responsabilités d'apôtre de Jésus-Christ :
« Mon Royaume n'est pas de ce monde » (Jean 18.36)
« soumis, à cause du Seigneur, à toute autorité établie par les hommes, soit comme roi, soit comme souverain, soit aux gouverneurs comme envoyés par lui pour punir les malfaiteurs et pour approuver les gens de bien » (1 Pierre 2.13-14)2.
S'il avait été pape, l'apôtre Pierre aurait refusé de mêler l'argent à l'exercice de ses responsabilités spirituelles :
« Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement » (Matthieu 10.8).
« Paissez le troupeau de Dieu qui est sous votre garde, non par contrainte, mais volontairement, selon Dieu ; non pour un gain sordide, mais avec dévouement » (2 Pierre 5.2).