C'est en octobre 1986, sur l'initiative de Jean-Paul II, que la quasi totalité des religions a été réunie autour du pape, à Assise : catholiques, orthodoxes, anglicans, protestants, juifs, musulmans, hindous, bouddhistes, shintoïstes, sikhs, membres des religions traditionnelles africaines et américaines, indiennes, zoroastriens. L'Église Catholique avait voulu montrer au monde que son objectif était à l'opposé de l'intolérance, de la volonté de convertir et de l'intransigeance : son premier but était la paix. Jean-Paul II a dit, le 22 décembre 1986, en évoquant ce grand rassemblement interreligieux :
« Les divergences sont un élément moins important par rapport à l'unité qui, au contraire, est radicale, fondamentale et dominante. [...] Toute prière authentique est suscitée par l'Esprit-Saint qui est mystérieusement présent dans le cœur de tout homme ». (in Tertium Millenium, édition Cité du Vatican, juin-septembre 1996).
Le chrétien né de nouveau, c'est à dire racheté par le sang de Christ et régénéré dans l'Esprit-Saint ne peut pas accepter ces propos audacieux de Jean Paul II. Il sait, en effet, pour l'avoir expérimenté, que Dieu ne donne son Esprit-Saint qu'aux hommes qui ont entendu l'Evangile, qui ont cru en Jésus-Christ et en son œuvre expiatoire :
« En lui vous aussi, après avoir entendu la parole de la vérité, l'Evangile de votre salut, en lui vous avez cru et vous avez été scellés du Saint-Esprit qui avait été promis, lequel est un gage de votre héritage, pour la rédemption de ceux que Dieu s'est acquis, à la louange de sa gloire » (Ephésiens 1:13-14).
Qu'est-ce donc qui a pu conduire l'Église de Rome à "l'Esprit d'Assise" et à ses autres rassemblements interreligieux ?
Par-dessus tout, on trouve chez ses dirigeants un désir profond d'en finir définitivement avec l'image d'une institution religieuse héritée du Moyen Âge. Le concile Vatican II s'est employé à cela en opérant des réformes qui ont plus touché, d'ailleurs, les formes extérieures de la piété que le fond doctrinal puisqu'on n'a pas voulu remettre en question la profession de foi du concile de Trente.
Il est utile de rappeler quelques grandes orientations du concile Vatican II qui ont accentué la séparation de l'Église Catholique de la parole de vérité, l'Evangile du salut.
« Et les pharisiens et les scribes lui
demandèrent : Pourquoi tes disciples ne suivent-ils pas la tradition des
anciens, mais prennent-ils leurs repas avec des mains impures ? Jésus leur
répondit : Hypocrites, Esaïe a bien prophétisé sur vous, ainsi qu'il est
écrit : Ce peuple m'honore des lèvres, mais son cœur
est éloigné de
moi. C'est en vain qu'ils m'honorent, en donnant des préceptes qui sont des
commandements d'hommes. Vous abandonnez le commandement de Dieu, et vous observez
la tradition des hommes. Il leur dit encore : Vous anéantissez fort bien le
commandement de Dieu, pour garder votre tradition. »
(Marc 7:5-9)
Il faut reconnaître que les grandes manœuvres œcuméniques semblent profiter actuellement à l'Église de Rome. Cependant, il ne faudra pas s'étonner de voir des chrétiens se tenir à l'écart de toutes ces démonstrations médiatiques, parce que l'obéissance à la Parole de Dieu et la fidélité au Seigneur Jésus conduisent nécessairement à la séparation d'avec le mal et le mensonge.
« Si quelqu'un enseigne de fausses
doctrines, et ne s'attache pas aux saines paroles de notre Seigneur Jésus-Christ
et à la doctrine qui est selon la piété, il est enflé d'orgueil, il ne sait rien,
et il a la maladie des questions oiseuses et des disputes de mots, d'où naissent
l'envie, les querelles, les calomnies, les mauvais soupçons, les vaines
discussions d'hommes corrompus d'entendement, privés de la vérité, et croyant que
la piété est une source de gain. Sépare-toi de ces gens-là. »
(1 Timothée 6:3-5)
Sur ce terrain, l'Église Catholique s'est engagée très loin et de manières les plus diverses. Prises de position officielles dans le domaine de l'éthique, réalisations d'œuvres à caractère social et humanitaire solidement orchestrées par les médias, revalorisation des arts religieux, actions en faveur de la paix et de la justice, etc? le tout accompagné d'une lecture de la Bible "éclairée" par les connaissances scientifiques, philosophiques, sociologiques, psychologiques? tellement chères à l'homme de notre fin de XX° siècle.
Là aussi, l'Église Catholique s'avance avec le langage de son évangile de la charité, empêchant les hommes de faire une distinction claire entre les principes confus de ce monde (même les mieux intentionnés) et la parole de libération si limpide de l'Evangile.
Le vrai disciple du Christ se contentera toujours d'appeler les hommes à la repentance et d'annoncer la bonne nouvelle du salut en Jésus-Christ. L'Esprit-Saint faisant le reste.
« Ce n'est pas pour baptiser que Christ
m'a envoyé, c'est pour annoncer l'Evangile, et cela sans la sagesse du langage,
afin que la croix de Christ ne soit pas rendue vaine. Car la prédication de la
croix est une folie pour ceux qui périssent ; mais pour nous qui sommes
sauvés elle est une puissance de Dieu. Aussi est-il écrit : Je détruirai la
sagesse des sages, et j'anéantirai l'intelligence des intelligents. Où est le
sage ? Où est le scribe ? Où est le disputeur de ce siècle ?
Dieu n'a-t-il pas convaincu de folie la sagesse du monde ? Car puisque le
monde, avec sa sagesse, n'a point connu Dieu dans la sagesse de Dieu, il a plu
à Dieu de sauver les croyants par la folie de la prédication. »
(1 Corinthiens 1:17-21)
C'est la reconnaissance par l'Église Catholique des valeurs constituées par les religions non-chrétiennes : elles ont quelque chose à faire connaître de Dieu, à quoi les chrétiens doivent être attentifs. La rencontre d'Assise et les rassemblements interreligieux de l'Église de Rome constituent des réalisations concrètes de ces textes. Nous montrerons ci-dessous que ces beaux principes, plutôt que d'apporter la vérité au monde, contribuent au contraire à enfermer les non-chrétiens dans leur religion.
Tout en baignant dans ce climat de renouveau produit par Vatican II, le Magistère romain restait toutefois fort embarrassé par le lourd passif de tous les comportements belliqueux et les attitudes dominatrices de la papauté à travers les siècles. Une simple lecture objective de l'histoire oblige pourtant à constater que ce qui a conduit les papes à tant d'excès dans le passé trouve le plus souvent son origine dans ces quelques mots : « Hors de l'Église (de Rome)2, point de salut » (Extra Ecclesiam Nulla Salus, bulle publiée en 1302 par le pape Boniface VIII). C'est bien cette célèbre devise qui a amené l'Église Catholique à l'intolérance, l'intransigeance, la volonté de convertir par la force et c'est pour cela que Rome a utilisé ces terribles moyens de pression que furent l'excommunication, les croisades, l'Inquisition, etc... dans le but d'exercer un pouvoir temporel absolu.
Pourtant, en changeant un seul mot à sa devise favorite, l'Église de Rome pouvait montrer devant Dieu et devant les hommes, qu'elle désirait réellement se réformer. Il lui suffisait de dire simplement : « hors de Jésus-Christ, point de salut ». En s'exprimant ainsi, les évêques et cardinaux du concile Vatican II auraient rendu l'Église Catholique à Jésus-Christ. Le pape n'avait plus lieu d'exercer ses prétendues fonctions de "vicaire du Christ" (vicaire = remplaçant) et on aurait laissé l'Esprit-Saint agir véritablement, comme aux temps apostoliques. Mais il aurait fallu alors abandonner les traditions, les dogmes, l'idolâtrie mariale, etc... Et ce n'était pas ce que désiraient les responsables catholiques. Ce qu'ils voulaient, c'était, avant tout, maintenir à n'importe quel prix leur position d'Église officielle aux yeux du monde. En observant toutes les entreprises politiques et sociales menées dans le but d'installer un esprit de justice, de paix et de fraternité humaine dans le monde, en constatant leurs difficultés et leurs échecs, l'Église Catholique aimerait, de son côté, montrer qu'elle détient la solution spirituelle du problème.
Le pape et les dirigeants catholiques se sont donc lancés dans de grandes manœuvres diplomatiques et médiatiques, cherchant à rassembler autour d'eux tous les hommes de bonne volonté, quelles que soient leurs croyances. Et c'est ainsi que l'Église de Rome se retrouve à l'extrême opposé de l'attitude qu'elle avait adoptée au Moyen-Âge. Ne voulant plus être accusée d'intolérance ou d'intransigeance, ne cherchant pas à imposer sa vérité, tout en apportant son évangile d'amour, elle voudrait se faire l'agent de la paix et de la justice dans le monde, sous la bannière de Jésus-Christ.
On a reproché à l'Église de Rome son esprit d'intolérance dans le passé. Va-t-on, à présent, l'accuser de tolérance outrancière envers les autres religions ? Tolérance ou intolérance ? Quelle attitude doit-on adopter pour annoncer l'Evangile ?
Lorsqu'un chrétien rempli de l'Esprit-Saint affirme devant les hommes que Jésus-Christ est la seule voie pour aller à Dieu, il ne fait pas preuve d'intolérance vis-à-vis des autres religions. Il indique seulement à celui qui cherche la vérité le passage obligé pour venir à Dieu :
« Jésus lui dit : Je suis le chemin, la vérité, et la vie. Nul ne vient au Père que par moi » (Jean 14:6).
Libre à chacun de le croire ou non.
Pareillement, lorsque des chrétiens appellent des hommes à la conversion, doivent-ils se montrer intransigeants ou plutôt conciliants ? Quelle attitude doivent-ils adopter ?
Si un chrétien inspiré par l'Esprit-Saint invite avec véhémence à la repentance et à la foi en Jésus-Christ Rédempteur, ce n'est certainement pas pour faire du prosélytisme religieux. Il avertit simplement les hommes (comme l'apôtre Paul le fit à Athènes) que Dieu
« a fixé un jour où il jugera le monde selon la justice, par l'homme qu'il a désigné, ce dont il a donné à tous une preuve certaine en le ressuscitant des morts » (Actes 17:31).
Libre à chacun de le croire ou non.
En somme, le véritable disciple de Jésus n'a qu'une chose à faire : annoncer la bonne nouvelle de la grâce de Dieu conformément aux Saintes Ecritures, tout en se laissant conduire par l'Esprit-Saint.
Le résultat de son évangélisation appartient à l'homme qui écoute et à Dieu qui, seul, peut opérer dans son cœur la régénération.
L'Esprit d'Assise, nous l'avons montré, n'est pas l'Esprit-Saint, c'est l'esprit du monde. Dans son discours final, à Assise, le pape a présenté clairement la finalité du mouvement interreligieux comme « un voyage fraternel dans lequel nous nous accompagnons les uns les autres vers le but transcendant qu'Il (Dieu) établit pour nous ». Et il a poursuivi en disant :
« Ce que nous avons fait aujourd'hui à Assise, en priant et en témoignant en faveur de notre engagement pour la paix, nous devons le continuer à le faire chaque jour de notre vie... » (in Tertium Millenium, Ed. Cité du Vatican, p.93).
Les notions de "but transcendant" et "d'engagement pour la paix" sont des concepts de philosophie et de sagesse humaine. Jésus a bien dit :
« Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix. Je ne vous donne pas comme le monde donne » (Jean 14:27).
La paix que le croyant racheté reçoit de Jésus, par son sang, c'est la paix avec Dieu :
« Etant donc justifiés par la foi, nous avons la paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus-Christ » (Romains 5:1).
Cette paix n'a rien à voir avec la paix que le monde peut se donner :
« Dieu a voulu par lui (son Fils) réconcilier tout avec lui-même, tant ce qui est sur la terre que ce qui est dans les cieux, en faisant la paix par lui, par le sang de sa croix » (Colossiens 1:20).
Est-il nécessaire de rappeler que lorsque Jésus a envoyé ses disciples dans le monde, il ne les a pas chargés d'une mission diplomatique envers les autres croyances ? Il leur a demandé d'annoncer la Bonne Nouvelle :
« Allez par tout le monde, et prêchez la bonne nouvelle à toute la création » (Marc 16:15).
« Allez, faites de toutes les nations des disciples, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit » (Matthieu 28:19).
Les disciples ont reçu l'ordre de mission d'inviter les hommes à se repentir pour obtenir le pardon des péchés :
« Et il leur dit : Ainsi il est écrit que le Christ souffrirait, et qu'il ressusciterait des morts le troisième jour, et que la repentance et le pardon des péchés seraient prêchés en son nom à toutes les nations, à commencer par Jérusalem » (Luc 24:46-47).
Si ce n'est par les hommes, les bergers catholiques accepteraient-ils de se laisser reprendre par Celui qu'ils appellent leur Seigneur ?
« Pourquoi m'appelez-vous Seigneur,
Seigneur ! et ne faites-vous pas ce que je dis ? »
(Luc 6:46)
2 - Parenthèse de l'auteur.